Typorama #02 : Helvetica mon amour !

12 décembre 2018  |   1 Commentaires   |    |  

histoire de la typographie Helvetica

À la manière des portraits de grands designers nous poursuivons ici notre série sur les typographies qui ont marqué le monde du design graphique. Voici donc Typorama #02, sur l'Helvetica !

Helvetica, toujours jeune à 60 ans !

Son nom ne laisse que peu de doute sur son origine géographique. Lorsque certaines polices de caractères semblent déjà datées à leur sortie, l'Helvetica, du haut de ses 60 ans passés, semble toujours aussi populaire et contemporaine. Sa longévité, son influence et sa neutralité font qu’on l’aime autant qu’elle nous agace. Revenons sur ce monument typographique, qui dès sa naissance influença une bonne partie du monde et qui est à lui seul symbole du style suisse.

C’est sous la direction d’Edouard Hoffmann, directeur de la fonderie helvète Haas, que le graphiste et typographe zurichois Max Miedinger dessina en 1957 la célèbre Helvetica. Il se basa pour cela sur l’Akzidenz-Grotesk, typographie de type linéale conçue par la fonderie berlinoise H. Berthold AG en 1896. Le but de Miedinger et d’Hoffmann était d’en proposer une version modernisée. Ils voulaient créer d’un point de vue optique la plus harmonieuse des polices. Des caractères réguliers qui finissent toujours verticaux ou horizontaux, une grande symétrie ou encore une épaisseur constante du trait confèrent à cette typographie linéale une rigueur et une neutralité à l’image du style suisse. Celle-ci favorise une uniformité qui se veut accessible au détriment d’une personnalité trop encombrante. Sa grande qualité devient alors pour ses détracteurs son grand défaut et ils regrettent sa standardisation aseptisée. Pour eux, là où l’Helvetica passe, la créativité et la diversité trépassent. Miedinger voulait en effet que l’accent soit mis sur le message véhiculé par la typographie plutôt que sur la typographie elle-même.

 

 

Le protocole Helvetica

Il y a quelques années, nous vous avions découvert le "protocole de l'Helvetica" qui est précieusement conservé au musée de l'imprimerie de Bâle. Il s'agit des cahiers consignant toutes les études ayant permis d'aboutir au dessin final du caractère typographique suisse. On y découvre, pas à pas, épreuves d'imprimerie à l'appui, le moindre changement apporté au dessin des lettres et toute la gamme des combinaisons possibles de caractères. Ce document unique fournit un aperçu détaillé de l'immense tache que représente la mise au point d'une famille (Bold, regular, italic...) de caractère typographique. Au final, pour obtenir un résultat au simple et efficace que l'Helvetica, il aura fallu un an de travail laborieux !

Pour approfondir : Découvrez les trésors du musée de l'imprimerie de Bâle 

 

 

C'est donc sous l'appellation "Neue Hass-Grotesk", que le résultat fut présenté pour la première fois au Salon international "Graphic 57" à Lausanne, où il rencontra un franc succès. La police correspondait parfaitement à la "typographie suisse", qui reçoit à l'époque une grande résonance sur le plan international.

Le caractère a ensuite été renommé par souci de commercialisation d’après le nom latin officiel de la Suisse : Confœderatio Helvetica.

 

À la conquête du monde

La typographie Helvetica fut exportée aux États-Unis pour se retrouver entre les mains d’un grand nombre de directeurs artistiques. Apple décida aussi d’acheter ses droits d’utilisation ce qui favorisa sa grande diffusion. Ce ne fut cependant pas le cas de leur concurrent Microsoft, qui décida d’utiliser une autre police : l’Arial. Dessinée en 1982, mais intégrée à Windows comme typographie par défaut en 1992, l’Arial, bien que très populaire, a été conçue pour faire concurrence à l’Helvetica et en est une imitation. La compétition entre ces deux entreprises passe donc aussi par la typographie. Chose amusante pourtant, Microsoft utilisa pour son logo de 1987 à 2012 non pas l’Arial mais l’Helvetica en bold italic.

 

Je t'aime, moi non plus...

C'est la police de caractère "universelle" par excellence, sans sous-entendu, sans message inconscient. Sa forme s'efface pour  laisser le lecteur se concentrer sur le fond d'un message. Si on rajoute qu'il s'agit d'un des caractères les plus lisibles au monde, on pourrait lui décerner la palme d'or de l'écologie cognitive.

C'est vrai, quand le brouaha de la communication résonne, on aura tendance à aimer les gens discrets et calmes comme l'Helvetica... et puis quand le silence revient, on aura envie de rompre la monotonie avec un gros éclat de rire (cf: la Comic-sans) ou une délicate mélodie (cf: Le Didot). Bref... l'Helvetica, on l'aime autant qu'on la déteste...

La star des logos !

Depuis plus de 60 ans, les logos en Helvetica sont omniprésents. Sa grande lisibilité et sa neutralité font que nombre d’entreprises, d’États ou d’institutions lui confient leurs documents officiels, leurs signalétiques ou encore leurs images de marque.

La liste des compagnies employant Helvetica dans leur logo est interminable : Post-It, Jeep, Evian, BMW ou encore Nestlé.

 

Nombre de villes l’utilisent aussi pour leur transport en commun comme c’est le cas du métro de Chicago, de Madrid ou encore celui de New York. Elle est aussi par exemple la typographie officielle de l’identité visuelle du gouvernement canadien.

Pour la blague, notons qu'Helvetica est même une police d'assurance au Maroc !  (merci à Tarik pour l'info !)

La popularité ainsi que la grande pérennité de l’Helvetica prouve l’atemporalité de ce caractère qu’on peut trouver aujourd’hui en 110 versions comprenant le latin, le cyrillique, l’hébreu, le grec, mais aussi les systèmes d’écriture chinois, japonais ou encore coréen. La Suisse, ce pays aux quatre langues officielles, a réussi à se faire comprendre du monde entier par une cinquième langue, plus universelle encore : l’Helvetica.

Et Max ? Qu'est-il devenu ?

En dehors de l'Hevetica, Max Miedinger n'aura pas laissé beaucoup d'autres réalisations. Trois caractères ont été commercialisés, toujours par la fonderie Haas. Le Pro Arte (1954) une typographie de cow-boy, l'Helvetica Rounded (plus connu sous le nom de VAG Rounded et initialement conçu pour Wolkswagen) et enfin l'Horizontal (ré-édité sous le nom de Miedinger) qui se voulait un concurrent d'une autre star de la typographie l'Eurostile d'Aldo Novarese.

Max Miedinger décède en 1980 à Zurich.

Happy Helvetica to you

À l'occasion des 60 ans de la création de l'Helvetica, les hommages se sont multipliés. Citons 60helvetica une exposition d'affiches originales où des designers du monde entier expriment leur amour, leur regard, ou même leur défiance envers ce caractère. Ci-dessous, les deux affiches que nous avions présentées. Il s'agissait d'un regard critique, sous forme de mise en abyme des milliers d'affiches "Tribute to Helvetica" que l'on peut croiser sur internet. Vous savez, ces affiches stéréotypées, toujours en rouge, blanc et noir, et qui sont pour la plupart des copiés-collés. Copier-coller, c'est exactement ce que nous avons fait pour réaliser cette affiche. Une peu comme une réponse du berger à la bergère, on se parle franchement, on se critique, mais au fond on continue de garder les moutons ensembles depuis 60 ans !

Pour approfondirDécouvrez les affiches en hommage à l'Helvetica

Le récif de l'Helvetica

Pour terminer, on vous propose l'épisode sur la typographie Helvetica issu du podcast de l'Océan des Cent Typos. Un podcast où l'on peut suivre les aventures de l'intrépide Malo Malo ! ...que nous remercions, au passage, pour la rédaction de cet article ! :-)


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1 commentaire :

  1. JR :

    Bonjour.

    Typographie : https://fr.wikipedia.org/wiki/Typographie
    À ne pas confondre avec « police de caractère », surtout quand on veut passer pour un professionnel.
    ;-)

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