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Le logo du Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme perd son chandelier

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La nouvelle identité du Musée d'Art et d'Histoire du Judaïsme est l'œuvre de l'atelier Doc Levin, réalisée en collaboration avec la graphiste Hélène Marian et Leo Quetglas. Le projet s'appuie sur la création d'une typographie dessinée par Malou Verlomme et commanditée par Doc Levin, sous la direction artistique d’Hélène Marian.
L'ancien logotype datait de 1997, et il avait été réalisé par Philippe Apeloig.

La nouvelle identité visuelle

L’acronyme «mahJ», nom d’usage employé par l’équipe du musée, devient l’image officielle du musée. Ce choix est motivé par la volonté de simplifier la dénomination développée du musée, ainsi que pour accroître sa force et son impact graphique. L'acronyme permet aussi de rassembler les différentes missions et natures du musée (art, histoire, Judaïsme) dans un mot unique. Malgré ces arguments, le choix de ce nom semble masquer l'objet même du musée dans un acronyme obscur, dont la prononciation reste hasardeuse (Magie ? Mage ? Mahaj ?). On notera l'absence de signe graphique dans le logo. En résulte un projet bien plus austère que la précédente identité visuelle (lire-ci-dessous).


La refonte de l'identité du musée donne une place primordiale à la typographie, comme un hommage à la place fondatrice du texte et de l'écriture dans l'art et l'histoire du Judaïsme.

Hélène Marian :
"Porteuse des centaines d'événements annuels du musée (expositions d'art et d'histoire, projections, colloques, concerts), cette typographie devait pouvoir être porteuse de tous types de discours, c'est pourquoi nous l'avons souhaité tout d'abord utilitaire, mais néanmoins subtilement marquée historiquement. Incarnée sans pour autant être illustrative."

C’est une typographie linéale «historique» qui se caractérise par de fortes nuances de graisses, ainsi que par des courbes souples et des terminaisons piquées et évasées. Ce style lui confère autant de lisibilité que de caractère pour assurer l'image sobre et institutionnelle de l'établissement. Il semble en effet tout à fait fonctionnel, que cela soit en grand corps sur un support de signalétique, qu'en petit corps dans un texte de labeur.

L'ancienne identité visuelle


À la fois figuratif, mais à la limite de l'abstraction ; totalement maitrisé et en même temps plein de maladresses, ce logotype reste pour moi comme un monument du graphisme. Symboliquement, cette Menorah (chandelier à 7 branches) illustrait autant le sujet (Judaïsme) que la mission du musée, à savoir de nous éclairer ! Sorti alors que je n'étais encore qu'étudiant, j'ai été fasciné par ce mélange de rigueur typographique et ce plaisir, presque enfantin, de la tache d'encre dans emblème. Ce symbole est d'une grande virtuosité dans l'équilibre du noir et du blanc.

Philippe Apeloig :
"Tous les détails ont été étudiés et calculés. Et pourtant rien n'est parfait. Sans cesse il a été question de cheminement et d'incertitude. Finalement, la silhouette du chandelier (inversé en noir au blanc) surgit d'une forme qui rappelle celle des pièces de monnaie, des sceaux et des poinçons. La lumière des sept flammes est présente. Le logotype qui identifie le musée n'est qu'une simple étape de mes recherches, mais pas l'ultime. Certes il reflète l'unité du sujet et sa diversité, mais encore aujourd'hui, je ressens le besoin de perfectionner mon projet, comme si tout au long de ce travail, subsistait une absence de repères difficile, voire impossible, à combler."

Alors, qu'est-ce qu'on gagne, qu'est-ce qu'on perd ?

Il faut admettre que cette nouvelle identité visuelle nous offre une très belle création typographique en parfaite adéquation avec la mission culturelle du musée. Il va falloir se faire à l'idée que le logotype précédent appartient désormais à l'histoire du patrimoine graphique français. Il aurait été intéressant de trouver une façon de faire perdurer le chandelier de façon plus discrète, un peu à la manière de la résurgence de l'emblème créé par Jean Widmer pour le Centre Pompidou qui avait failli disparaitre.

Pour conclure cet article, risquons-nous à une hypothèse, malheureusement assez sombre, sur les motivations de ce parti pris typographique. Pour la petite histoire, la proposition initiale de logo d'Apeloig en 1996, qui consistait à mélanger l'étoile de David avec une spirale, avait été écartée par la commission pour éviter les dérives interprétatives et les polémiques d'un symbole religieux trop "ostentatoires". À l'heure où j'écris ces lignes, nous vivons encore dans un quotidien traumatisé par les attentats du 13 novembre dernier. Le choix d'écarter un symbole religieux de la communication d'un établissement culturel parisien ne doit, dans ce contexte, pas être totalement fortuit.

C'est à ce moment-là que l'on se rappelle la force des signes par rapport aux mots. Et comment, leur manipulation mérite attention, respect et engagement. Si on peut probablement regretter une forme d'autocensure pour raison de sécurité, il nous semble indispensable de continuer à donner du sens derrière chaque signe, pour que la culture puisse participer à éclairer nos sociétés.

Pour en apprendre davantage sur le travail réalisé en 1996 par Philippe Apeloig :

Philippe Apeloig: «Suggérer plutôt que montrer» Le Journal des Arts nº430

La spirale, la main et la ménorah

Recherches pictographiques réalisées par Philippe Apeloig en 1996 pour la création du logotype du musée du judaïsme

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