À la rentrée 2017, le clitoris est enfin représenté en entier, mais dans un seul manuel de SVT français, celui des éditions Magnard. On peut applaudir la nouvelle, mais déplorer qu'il ait fallu attendre 2017 pour représenter cet organe du plaisir féminin aux allures de bréchet, vous savez, cet os de poulet que l'on rompt à deux par le petit doigt et qui est censé porter bonheur. C'est d'ailleurs à cause de sa ressemblance avec l'entrejambe féminin (enfin plutôt au clitoris, maintenant on peut se le dire) que l'on attribue à cet os de volatile des propriétés liées à la fécondité et à la vie, et ce depuis l'antiquité. Si les étrusques utilisaient le bréchet pour y lire des oracles et formuler des vœux, on peut désormais souhaiter bonne fortune au clitoris, et que la gloire prime enfin sur la honte.
Bréchet ou clitoris, chacun sa chance
Parce qu'il faut préciser qu'en 2017, d'après une étude menée en février, 1 femme française sur 5 ne sait toujours pas où se situe son clitoris. La faute à qui ? Aux religieux d'abord, à Freud ensuite, et à un oubli généralisé dans la médecine et la société.
Faisons un petit saut dans le temps pour comprendre l'évolution non linéaire de la représentation de cet organe et de comment on l'a oublié, en commençant par cet extrait tout frais, qui rassemble des réactions de jeunes face à un clitoris en 3D :
Dans l'antiquité, la femme était plutôt lubrique, et l'homme intellectuel. Il était d'usage que certaines femmes se montrent la vulve pour faire une bonne blague, et que l'on mange des gâteaux de miel en forme de vulve dans les palais Grecs, pour célébrer la féminité. De manière tout à fait décomplexée, le sang menstruel était même vécu comme un phénomène magique. On a bien changé, pas vrai ? C'est en partie dû au regard "scientifique" des Lumières, qui a assombri l'image du sexe féminin, en en faisant l'origine de tout mal. L'auteur Liv Strömquist explique très bien toute cette époque dans son album "L'Origine du Monde" dont on reparle plus bas.
Au 16e siècle, Colombo (l'anatomiste italien, pas l'inspecteur) met un nom pour la première fois sur cette chose érogène : le clitoris. Il en parle comme "un organe si joli et tellement utile". Pouce en l'air pour Colombo ! Il fait des recherches et des gravures sur le sujet, et l'on sait qu'il est lié au plaisir féminin. En pleine Renaissance autour de 1510, De Vinci étudie aussi la question de l'anatomie féminine, art oblige. À l'époque, comme à l'antiquité, on pense que la femme doit jouir pour procréer. Du coup, c'est un peu l'âge d'or du clitoris.
En parallèle en art, les poils pubiens peuvent bien aller se faire voir chez les Grecs, dont les statues de marbre, imberbes, lancent la mode chez les artistes classiques. On sait aujourd'hui que ces statues étaient souvent enduites et peintes, et il est fort possible que les Vénus de l'époque aient porté une toison pubienne... Toujours est-il que ce malentendu servira de norme pendant plus d'un millénaire, pendant lequel les poils n'avaient (et n'on( toujours pas) pas la cote.
Car le nu féminin, jusqu'au XIXe siècle, n'est pas obscène s'il n'est pas velu. Il est convenable de représenter la femme nue, à condition que ce soit une déesse. On laissera les poils aux prostitués et aux femmes faciles, jusqu'en 1914. La Vénus d'Urbino de Titien fait d'ailleurs scandale en 1538, puisque cette femme n'a de Vénus que le nom. Reprenant le thème de La Vénus endormie de Gorgione, mais cette fois allongée dans sa chambre avec deux servantes à sa portée, elle ne dupe personne sur sa véritable identité. Cette scène probablement offerte en cadeau de mariage représente en réalité non pas une déesse mais bien une femme, fidèle (symbolisé par le petit chien à ses pieds) qui s'offre à son plaisir et celui de son mari. Rien de bien dramatique.
Comme l'explique Paul Veyne dans son analyse sur ce tableau, cette vision vénitienne illustre le désir, mais sans transgression d'interdit, thème chéri par les viennois et qui fera l'héritage de Freud, dont on parlera plus bas.
Dès 1750 on met le holà au plaisir solitaire, parce que se masturber en couple, c'est bon pour la fertilité, mais se masturber seul c'est très très mal : l'onanisme est accusé d'être une "pratique funeste" ! Oui messieurs-dames. On pense que l'on peut en mourir, surtout dans les sociétés protestantes de l'époque, en Allemagne, aux États-Unis ou en Grande-Bretagne.
Les illustrations ci-dessous sont tirées du Livre sans Titre (sur un sujet dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom, un peu comme Voldemort) dans lequel on voit un homme "jeune et beau qui faisait de l'espoir à sa mère" vomir le sang, perdre ses dents et se couvrir de pustules pour finalement mourir "dans des tourments horribles".
On investi beaucoup de créativité et d'énergie pour bannir ce genre de pratiques, qui risquent de perdre une semence si précieuse. Cliquez pour lire les textes et voir les détails des images ci-dessous, c'est un vrai plaisir.
Les conséquences fatales de la masturbation
Il faut dire que l'on croit que les semences de l'homme et la femme émises lors de la jouissance sont nécessaires pour donner la vie. En couple, c'est du coup un moyen de contraception préventif. En revanche à l'époque, la masturbation en solo est synonyme de pêché atroce car il empêche la vie et va à l'encontre de la natalité (ça fait un peu penser aux arguments contre l'IVG, non ?) Parfois même, on excise les jeunes femmes, de manière punitive -ou préventive- et thérapeutique. Bref, c'est une époque très sympa.
En 1880, on découvre qu'en fait non, le plaisir féminin n'a aucune fonction reproductrice ni d'influence sur la fertilité : l'ovule dépend d'un cycle, pas de la jouissance. Pour éviter que les jeunes femmes ou les veuves -donc les célibataires- ne deviennent hystériques (une névrose qui fait un tabac à l'époque de Freud, dont on se demande aujourd'hui si ce n'était pas un peu une maladie fourre-tout), elles peuvent aller chez le médecin pour avoir un orgasme. Oui bonjour, c'est pour une prescription !
Dans la même veine, notre cher ami Kellogg (oui, celui-là même à qui l'on doit les céréales du petit déjeuner) crie sur tous les toits que la masturbation féminine est à l'origine du cancer de l'utérus, de la folie (l'hystérie), de l'épilepsie et tout un tas d'autres maux heureux. Et comme il est aussi médecin en plus d'être inventeur de pétales croustillants, son avis est pris en compte, même quand il écrit que "l'application d'acide phénique pur sur le clitoris constitue un excellent remède pour calmer toute excitation anormale". Ce à quoi on aimerait lui répondre que l'application d'un revolver sur la tempe est un excellent remède aux maux de tête. Mais on va se retenir.
Une vingtaine d'années auparavant, en 1866, Courbet a peint son bien connu "L'Origine du Monde". Commandée pour le diplomate Khalil-Bey, la toile est peu présentée aux yeux du public avant 1944 et ne provoque pas le scandale que l'on aurait pu imaginer, à cause de cette pilosité obscène pour l'époque. On assimile encore les poils à l'animalité, en idéalisant un corps de femme imberbe et lisse, comme figé dans un état asexué et hors du temps.
Mais peu ont d'ailleurs remarqué, comme l'a fait l'auteur Marc-Alain Descamps dans son livre "L'invention du corps" que "le plus curieux est que cette toison pubienne qui lui fait si horreur (à l'humanité), car elle évoque l’animal, n’existe chez aucune espèce animale. Personne ne semble jusqu’à maintenant avoir fait la remarque que les animaux ont des poils partout, sauf justement là où en a l’homme." Les animaux n'ont jamais "de poils au pubis, au périnée, aux aisselles ou sur les seins, même pas une seule espèce de singes, qui sont pourtant les plus proches de l’homme."
Et pourtant jusqu'en 1960 en France, les éditeurs doivent gommer les poils pubiens pour éviter la censure.
Et puis ce cher Freud arrive avec ses gros sabots et ses Essais sur la théorie sexuelle publiés en 1905 jusqu'à 1920. Il y explique que la femme ne doit jouir que du vagin (le fameux orgasme vaginal), parce que le clitoris est réservé à la sexualité des petites filles. Les femmes qui n'atteignent pas l'orgasme par pénétration sont classées dans la catégorie des frigides et ont besoin d'aide psychologique. Adieu clitoris, bonjour vagin. Et tout le monde le croit (encore aujourd'hui !). Freud conçoit donc que le plaisir de la femme n'est possible que grâce à l'intervention d'un homme, et non grâce à son anatomie propre...
En 1930, une norme morale dictée par deux ecclésiastiques est appliquée au cinéma américain, et se distille peu à peu outre-Atlantique; c'est le code Hays. Il interdit notamment l'apparition de corps nus à l'écran. C'est à ce moment là que le mot clitoris disparaît du dictionnaire. Bravo, retour à la case XVe siècle ! L'omerta Freudienne prend de l'ampleur pour atteindre son apogée dans les années 60, pendant lesquelles on ne parle ni étudie l'organe désormais boudé en société. Il disparaît même des traités d'anatomie, comme le fameux Gray's Anatomy.
Pour rappel à l'époque, comme le clitoris a le malheur de ne pas être utile à la procréation ou que l'on se méfie du plaisir féminin, la médecine le boude. Il faudra attendre 1998 avant que l'urologue australienne Helen O'Connell publie une étude qui mènera à la première illustration détaillée de l'organe. Dans les années 2000, Odile Buisson travaille à mieux comprendre l'aspect et le rôle du clitoris, qui sera en 2016 modélisé et imprimable en 3D et réalisé cette fois par une autre Odile, Odile Fillod.
N'en déplaise à Freud, on sait désormais que c'est le clitoris qui est à l'origine de l'orgasme, car il entoure le vagin. L'illustratrice Emma a réalisé une série de dessins pour expliquer le fonctionnement du clitoris et justement briser les tabous en s'adressant aux femmes comme aux hommes.
Heureusement, l'envie de dévoiler la vérité fait de plus en plus d'adeptes, et on ne pouvait pas écrire cet article sans partager cette vidéo de Lori Malépart-Traversy qui résume bien cette lente évolution :
Malgré tout, aujourd'hui encore, la vulve ou le sexe féminin n'est que rarement représentée en illustration ou en anatomie (il suffit de regarder sur les banques d'images) et on préfère représenter une forme plate à la Barbie, car c'est quand même plus rassurant... Pas de poils, pas de fente : pas de sexe !
Pour revenir au début des années 1900 à l'époque de Freud, les artistes un poil portés sur la chose s'en donnent à cœur joie. Au début du siècle, Schiele est incarcéré pour ses dessins érotiques qu'il montre à des mineurs, Schad, Magritte ou Duchamp (ci-dessous) illustrent masturbation féminine, violence du regard de l'homme sur le corps féminin, ou voyeurisme fascinatoire. On retrouve le plaisir lié à la transgression de l'interdit, dans l'héritage de ce cher Sigmund.
Mais s'il est fantasmé, exutoire ou provocateur, cet art reste encore lié au plaisir... des hommes. Les "Deux filles" de Schad sont en plein acte, sous les yeux d'un homme discret dont seul le bracelet de montre apparaît en haut du tableau. La figure du "Viol" de Magritte est rousse -symbole de la tentation ou de l'impureté- et nous transforme malgré nous en voyeurs-violeurs. Quant à "Étant donnés" de Duchamp, l'oeuvre ne peut être vue qu'a travers la fente d'un judas de porte, comme une mise en abyme des mystères insondables du sexe féminin.
Heureusement, quelques artistes feminines viennent "dé-érotiser" ces représentations. Là où les hommes ne voyaient qu'une fascination sexuelle, les femmes glorifient, elles, le corps et la vulve.
En 1966, l'artiste féministe Niki de Saint Phalle réalise une oeuvre gigantesque, 'Hon' (Elle), avec son mari Jean Tinguely. Cette femme de 28m allongée installée dans le musée d'art moderne de Stockholm marque un tournant décomplexé dans la représentation du vagin dans l'art. Sur le point d'accoucher, elle invite les curieux à faire le mouvement inverse et à rentrer en elle. Un peu comme des fidèles entreraient dans un temple sacré.
Cette oeuvre représente, d'après l'artiste, "une cathédrale, une kermesse, le retour à la mère, ou la plus grande putain du monde... je ne sais pas combien de milliers de spectateurs ont passé entre ses portes". À l'intérieur, on trouve de faux tableaux, un milk bar, un cinéma... Le vagin serait-il devenu une nouvelle religion ?
En 1974, n'en déplaise à Freud, une autre femme artiste s'attelle pendant plus de 5 ans à rendre hommage aux figures féminines. "The Dinner Party" de Judy Chicago représente un gigantesque banquet triangulaire où président des femmes ayant marqué l'Histoire, de la préhistoire aux révolutions féminines. Dessus, 39 assiettes de porcelaine aux allures de sexe féminin sont disposées, accompagnés de couverts et calices dorés agencés sur des napes brodées aux noms des 39 femmes.
Au total, 1 038 déesses, femmes mythologiques ou historiques sont mises à l'honneur. 999 noms sont inscrits en doré sur le carrelage et accompagnés de panneaux explicatifs, pour faire briller les 39 autres installées à table. Celles qui sont au sol illustrent, d'après l'artiste, "la lutte d'une myriade de femmes pour devenir célèbres ou faire entendre leurs idées -parfois face à des obstacles écrasants- pour que leurs réalisations durement gagnées soient finalement (comme les femmes à table) marginalisées ou effacées".
On ne manque pas d'idée quand il faut représenter une vulve. Chat, fourrure, abricot, pastèque, les comparaisons vont bon train pour illustrer la chose, comme sur ces affiches des monologues du vagin. Mais si on en montrait, en vrai ?
Plus récemment, ce n'est ni la figure de la femme forte ni celle de déesse que les artistes souhaitent mettre en avant à travers leurs œuvres vulvaires. Il s'agit désormais d'une revendication pure et simple de la féminité, pour affirmer et dévoiler le sexe féminin en tant que tel. La représentation de la vulve ne se fait plus par provocation, ni par opposition au masculin ; elle est devenue un symbole d'existence, pour montrer sans honte un sexe qui s'acquitte enfin de la mauvaise image qui le ternit depuis des siècles. Destinées avant tout aux femmes pour découvrir et mieux aimer leur corps, ces œuvres sont souvent participatives.
En 2012, le plasticien Jamie McCartney a plâtré 400 sexes féminins de femmes de 18 à 76 ans (transgenres et vraies jumelles inclus) pour en montrer le vrai visage, dans son "Great Wall of Vagina" (la Grande Fresque du Vagin). McCartney est parti du constat que les femmes, peu informées sur l'aspect de leurs parties intimes et influencées par les standards pornographique, ont souvent une mauvaise image de leur sexe. Celui-ci est parfois une telle source de complexe que de plus en plus de femmes et de jeunes filles ont recourt à des opérations chirurgicales; la labioplastie figure au 19e rang des opérations les plus pratiquées dans le monde !
Si cette "origine du monde" en plâtre a un côté éducatif sous un soupçon de voyeurisme, cette "œuvre d'art à conscience sociale" n'est, comme le dit l'artiste : "pas vulgaire, mais vulvaire !"
Dans la même visée éducative, au Danemark, l'association K. Vinders a créé un photomaton de vulves, le Kussomat, pour dévoiler la diversité des parties intimes féminines. Une façon de lever le voile sur ce qu'il y a sous les jupes des filles.
Un tel travail peut sembler étonnant mais il faut rappeler que le sexe féminin de Madame Tout le Monde n'est que très rarement représenté, à part peut-être dans l'Origine du Monde de Courbet. Résultat, les médias, et les films (pornographiques, la majorité du temps) font office de modèle, et dictent leurs lois : épilation intégrale, petites lèvres minuscule et peau lisse sont de rigueur. La standardisation de la vulve se passe sous la culotte. Barbie est aussi pas mal placée en terme de modèle, avec son non-sexe. Il suffit de voir les illustrations anatomiques pour remarquer que bizarrement les femmes n'ont rien entre les jambes, c'est étonnant.
L'article "Le marketing du vagin" (qui devrait d'ailleurs s'appeler "de la vulve" !) montre bien le diktat grandissant de certaines marques qui exacerbent l'anxiété des femmes sur des problèmes inventés, tout en leur apportant la solution. C'est ce qu'on appelle le "marketing de la honte". Il est d'usage de faire croire aux femmes que leur sexe est moche, trop sombre, pas assez bien épilé, difforme, ou qu'il sent mauvais. Car, oui : il existe des crèmes pour éclaircir la vulve, ou encore du maquillage irisé pour enluminer vos lèvres (du bas) et les faire briller de mille feux, mesdames.
Alors, à quand le déodorant intime fraicheur orchidée ?
Parler du sexe féminin est encore délicat, mais aborder le sujet des règles est une nouvelle montagne à gravir. Tout un univers de papillons, d'éclats de rire, d'arcs-en-ciel, de liquide bleu, de pantalons blancs moulants et de filles sportives s'ouvre sous nos yeux ébahis ! Le language visuel des marques de produits intimes vise à cacher la présence de sang, et à nous faire croire que les règles deviennent un moment formidable grâce à un produit invisible qui va faire l'effet d'un aspirateur rafraichissant dans les culottes ou les vagins.
Deux idées reçues alimentent ce genre de visuels :
1, les règles c'est la honte, il ne faudrait pas que quelqu'un voit ça, ni qu'on en parle en public.
2, grâce à ces protections magiques, plus de douleurs ni de fatigue : on peut enfin vraiment rigoler.
Résultat, un embarras encore plus grand lorsqu'un tampon se faire la malle de sa pochette ou que l'on a mal au bide et que l'on n'est pas en train de se poêler comme dans les pubs.
Mais aujourd'hui et depuis 2 ou 3 ans, l'évocation du sujet devient de moins en moins tabou. Les codes changent, et les regards évoluent. Certaines marques appellent désormais un chat un chat (ou une chatte une chatte) et utilisent du liquide rouge pour symboliser les règles, ou jouent avec des codes graphiques différents.
Pour aborder librement le sujet des règles, l'auteure-illustratrice suédoise Liv Strömquist a investi la station Slussen à Stockholm en novembre dernier, avec des visuels tirés de sa bande dessinée "L'Origine du Monde" que l'on vous recommande absolument de lire ! Cette BD retrace justement l'évolution des moeurs autour du sexe féminin, et la perception de la société sur ce sujet. Dans l'exposition souterraine on voit -parmi d'autres images de pastorale idyllique- danser des femmes à la culotte tachée.
Si certains ont trouvé son œuvre provocante au point de vandaliser certains visuels, Strömquist a répondu qu'on allait s'en remettre. Une manière détachée de dire qu'il est grand temps que l'on arrête d'avoir honte du corps de la femme, de son sexe, et des règles.
En 2015, une marque de coupe menstruelle (ce truc magique qui révolutionne la vie d'une femme) a fait le buzz avec un vampire et... du sang, forcément. En octobre 2017, c'est la marque anglaise Libresse qui a fait couler beaucoup d'encre pour avoir versé du sang rouge pour la première fois de l'histoire de la publicité sur une serviette hygiénique. On applaudit l'ère bientôt révolue du sang de Schtroumpfette ? OB, si vous nous lisez...
Si le regard change, les marques s'adaptent. En montrant ce qui était tabou comme on l'a vu plus tôt, ou en détournant les codes. On a vu récemment les publicités de la marque américaine Thinx (qui développe des culottes de règles) s'afficher sans vergogne dans le métro new yorkais. Avec leurs codes tirés d'univers surréaliste et mode, on est loin des champs de pâquerettes avec des filles aux règles bleues hilares dans leur pantalon moulant blanc. Thinx à fait appel au plasticien Samuel Shumway pour concevoir des décors en papier (gif ci-dessous). On pourrait se croire face à la campagne mode A/H 2017 d'une marque new yorkaise branchée. C'est presque le cas, à la différence près que les protections périodiques se vendent toute l'année.
Oeufs, pamplemousses, poches de sang, les symboles sont clairs. "L'humain qui a ses règles" (femme ou homme transgenre, d'ailleurs) se tient le ventre, joue du ukulélé et mange. La réalité se veut belle visuellement, mais réaliste.
Qui dit tabou brisé, dit fin du silence ! Depuis 2016, les journaux sortent régulièrement des éditions spéciales sur le sujet. Les blogs et livres s'enchaînent, comme Check ta chatte de Emma, le nouveau livre Les joies d'en bas qui aborde l'anatomie et les particularités du sexe féminin d'un angle décomplexé et drôle, le spectacle Chattologie qui se rit des règles (jusqu'au 9 juin au théâtre des 3 bornes à Paris), ou encore à Lyon le projet "Balance ta vulve" du Fanzine Frangine.
Graphiquement, c'est la libération. Des images ni trop prudes, ni trop osées, qui symbolisent ou illustrent souvent avec humour. Sur la page instagram de Club Clitoris, on découvre nail art, tatouages et vases en forme de vulve.
Ce n'est pas un hasard si le clip "Les Passantes" de Brassens commence par une série d'images suggestives. Créé par Charlotte Abramow et dévoilé le 8 mars dernier, la vidéo comptabilise déjà plus de 528 000 vues. Comme l'explique Charlotte sur son site, "le féminisme est un combat de société pacifique qui nous lie, et non nous sépare". L'égalité hommes-femmes en somme, c'est aussi avoir le droit de payer sa moule !
Télérama, Courrier international et L'Obs ont même fait la une sur le sujet, mais peut-être pour certains un peu plus pour surfer sur la vague que pour réellement aborder la chose dans sa complexité.
Célébrons donc les années 201+ comme celles de la libération de la vulve, de la chatte, du minou, de la rigondonne, de la mouflette, du bijou... en attendant 2019 et la sortie de Pussypédia on vous laisse avec cette charmante chanson des années 60, à écouter ou à regarder...
( PS: pour les geeks, vous avez aussi la version 2.0 par Jeanne Cherhal).
Rédaction : T. Guillermou
Sources : BD - illustrations -art :
Liv Strömquist - L'origine du monde
Emma - Check ta chatte
https://www.timeout.fr/paris/art/sexe-feminin-dans-lart
Articles :
http://www.racontemoilhistoire.com/2015/04/27/clitoris-au-fil-siecles-decouverte-mauvaise-reputation/
https://www.franceculture.fr/societe/clitoris-pourquoi-avoir-attendu-2017-pour-le-representer-dans-les-manuels-scolaires
https://www.theguardian.com/cities/2017/nov/02/enjoy-menstruation-subway-stockholm-art-row-liv-stromquist
Excellent article ! Ma vulve et moi vous remercions.
Il suffirait d’expliquer que le sexe de l homme et celui de la femme ont la même origine et évoluent différemment au stade embryonnaire. Cela remettrais les choses à leur place, si J ‘ose dire.