Cet été, quel ne fut pas mon étonnement de découvrir ce paquet de cigarettes "presque sans marque". Dans un premier temps, du point de vue du designer, on se dit que ce paquet est magnifique et qu'on se rend vraiment compte de la force iconique de l'identité Marlboro. Dans un second temps, on se demande qu'est-ce qu'il leur a pris d'être aussi radical et minimaliste. En effet, les marques n'ont pas l'habitude d'être aussi "less is more" !
Comme il n'y a pas de fumée sans feu, inévitablement, on a en tête l'incendie prochain que sera l'arrivée des paquets de cigarettes sans marques. Cela fait très longtemps que des associations antitabac demandent cela, et cela a déjà été mis en place dans de nombreux pays ( UK, Australie,...). On peut donc imaginer, à travers ce packaging, que la marque des cowboys fait un joli "doigt d'honneur" aux institutions de santé, en leur montrant que même sans écrire leur nom, ils restent puissants ! C'est peut-être aussi une façon de commencer à s'effacer en douceur...
Ci-dessus, un paquet en lego... On dirait un paquet "pixelisé", un peu comme ferait Mireille Dumas pour rendre anonyme son invité.
On en entend parler depuis longtemps, notre ministre de la santé, Marisole Touraine promet de s'y attaquer dès cette rentrée, les paquets de cigarettes sans marques vont probablement arriver en France.
L'objectif de la mesure est de dissuader les jeunes de commencer à fumer et inciter les fumeurs à décrocher, en cassant l’attachement aux marques de cigarettes. L'esthétique du paquet, pensée pour être alléchante, est anéantie. Les emballages dits "neutres" adoptent un format standard et sans inscription marketing. Le nom de la marque est rédigé dans une police de caractères basique et uniforme.
Cette mesure radicale à un réel impact sur la consommation des jeunes. Une équipe de recherche de l’École des hautes études en santé publique de Rennes a exploré le sujet. Les chercheurs français ont mesuré l’impact du paquet chez les jeunes qui fument du tabac à rouler. 133 personnes, de 18 à 25 ans, ont consommé du tabac emballé dans un paquet neutre pendant dix jours. Le résultat est sans appel : "Les paquets neutres motivent les fumeurs à arrêter. Ils ont moins envie d'acheter des cigarettes".
Les jeunes forment un public sensible et vulnérable. À leur intention, l'industrie du tabac met au point des stratégies de marketing soigneusement étudiées et ciblées. Cette castration marketing serait donc efficace. On ne peut que s'en réjouir.
Bien sûr, les cigarettiers montent au créneau, et brandissent la menace de la contrefaçon. Un paquet sans marque serait plus facilement contre-faisable. C'est un fait. La marque a pour fonction de garantir l'origine d'un produit (cf: voir notre article sur l'origine du mot branding). Dès lors qu'elle disparait, cette garantie disparait. Avec tous les risques sanitaires que la contrefaçon peut générer. Mais à vrai dire, mourir d'un cancer AOC ou un cancer made in china, ça ne change pas grand-chose !
Je ne vais rien vous apprendre en disant que le paquet "Marlboro" est une icône. Certes, cela peut vous sembler peu éthique de mettre une "boite à cancer" sur un piédestal, mais c'est un fait, c'est l'une des plus grandes marques au monde.
Marlboro vient du nom du comté de Marlborough, en Angleterre où habitait le négociant Philip Morris. Les cigarettes Marlboro sont lancées dans les années 1920, à destination des femmes: le bout de la cigarette Marlboro est alors rouge, ce qui permet de ne pas voir le rouge à lèvres. Dès les années 1950, le packaging triangulaire apparait, il se veut plus masculin, plus viril. A la même époque, Leo Burnett invente le cow-boy Marlboro. Dès lors, ce sont les grands espaces, les chevaux sauvages et les cow-boys qui vont créer la légende Marlboro.
Un article intéressant (en anglais) relate l'histoire de ce paquet, et les différents tests consommateurs de l'époque.
Au passage, je n'avais jamais réalisé la cigarette subliminale cachée au sein de la typographie. C'est en voyant l'exemple de packaging ci-dessus que lumière m'est apparue !
Enfin, en guise de mo(r)t final(e), n'oubliez pas que :
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